3.10.11

Dépasser Utøya

Il est de ces événements matriciels qui concentrent en eux une époque, son passé et son avenir. Ils sont à la fois l’aboutissement, le climax, d’une suite logique de conséquences, d’enchaînements d’événements parfois anodins mais profondément cohérents ainsi que le creuset au sein duquel peut se forger une bifurcation civilisationnelle, voire un nouveau départ. Le massacre d’Utøya, en Norvège, qui a ensanglanté ce mois de juillet maussade comptera probablement parmi ceux-là. C’est donc autour de l’idée de multiplier les angles d’approche et d’analyse — sans pour autant prétendre épuiser ce sujet polymorphique — que Minorités et ENAR ont initié ce partenariat original entre nos outils de diffusion respectifs.

N

otre constat partagé est le suivant : quoique l’on découvre par la suite sur l’état de santé mentale du « terroriste blond » (remarquez au passage l’intérêt du qualificatif, chacun sachant qu’un terroriste a par définition les cheveux noirs), il n’en reste pas moins qu’il était imbibé de discours développés depuis plusieurs décennies par les partis d’extrême droite en Europe, voire de plus en plus par les droites de gouvernement. La violence orchestrée par Breivik ne sort pas de nulle part : elle a été patiemment nourrie de récits politiques de plus en plus légitimés, banalisés dans l’espace public et relayés aux plus hauts niveaux de l’Etat, discours qui déshumanisent l’Autre (musulman en particulier, mais pas seulement comme Breivik l’a si justement démontré), facilitant par là-même la possibilité d’une violence totale à son encontre.


Nous n’avons cessé de le prédire depuis des années : à force de banaliser les propos encourageant la haine, le différentialisme culturel, la hiérarchisation des groupes, des cultures, des communautés et des individus, cela ne peut que déboucher sur la violence. Tout le spectre des options étant possible en la matière : de l’évitement social au génocide en passant par les discriminations systémiques, l’exclusion, les insultes, les atteintes aux biens et aux propriétés, le meurtre… La démonstration est faite, une fois de plus, que les discours ne sont pas de purs objets idéels et désincarnés que l’on pourrait manier en dehors de tout contexte historique, social, culturel et économique, mais que leur pouvoir performatif sur le réel peut déboucher sur de véritables boucheries.


Ce qui constitue l’exceptionnalité de Breivik, annonçant une ère plus grave encore, c’est que sa violence n’a pas été essentiellement dirigée contre des individus ou des communautés d’habitude stigmatisés par ce type de discours (Roms, musulmans, juifs, gays…), mais contre celles et ceux d’entre la communauté majoritaire qui participeraient activement à la transformation des sociétés occidentales vers plus de diversité, d’égalité, de multi-culti.


Personne n'est à l'abri


Deux conséquences dès lors : plus personne n’est à l’abri de cette violence d’extrême droite qui révèle dans toute son ampleur la profonde abjection de sa matrice idéologique et le fait qu’elle vise, en réalité, tout qui s’oppose à sa vision de la société – peu importe que l’on soit d’une « minorité » ou non.


La deuxième, c’est que la société majoritaire — qui se sentait jusqu’à présent peu concernée par l’impact concret de ces discours de rejet et de préférence « nationale » car ils ne visaient « que » des minorités — commence à prendre conscience de l’effet délétère de ces rhétoriques sur l’ensemble de la société, majorité comprise ! On a même cru voir un instant poindre un semblant d’empathie pour les minorités victimes telles violences depuis belle lurette.


Ce qui nous préoccupe par contre plus profondément, c’est l’absence à peu près générale de métabolisation politique de ces événements tragiques : les partis d’extrême droite sont tous aux abois et redoutent de voir les propos de leurs leaders chéris cités dans le mémoire de Breivik. Chacun se précipitant le cas échéant pour décliner toute responsabilité personnelle et rejeter toute faute sur l’esprit dérangé de ce « loup solitaire ». Trop facile !


Si leur responsabilité pénale sera certainement impossible à établir, leur responsabilité éthique est, elle, écrasante. Voilà une occasion en or d’enfoncer notre clou et de mettre une bonne fois pour toute dans les cordes ces partis et leurs dirigeants — tous en quête éperdue de légitimation dans les champs politique et médiatique. Pourtant, tant les partis véritablement démocratiques (de l’extrême gauche à la droite) que les militants des Droits de l’Homme en général semblent ne pas trouver les moyens de transformer en essai gagnant cette opportunité.


Le contexte de la crise financière mobilise bien sûr les énergies, mais ce serait faire preuve d’aveuglement de croire que ces questions ne sont pas profondément liées. Un des rôles clés de l’extrême droite — dont les programmes économiques et sociaux prônent souvent un ultra-libéralisme mâtiné d’une préférence nationale pour élargir leur soutien populaire — est de défocaliser l’attention des électeurs de l’horreur économique qu’ils proposent en la reportant sur les problématiques « marginales » des migrants, des exclus, de la laïcité… à la périphérie des questions liées à la répartition des pouvoirs et des richesse. Donner des os à ronger à la meute pendant que le vrai « business » a lieu à l’abri des regards… Cette technique est vielle comme le monde, mais ô combien efficace.


Ultra-libéralisme et haine de l’Autre sont deux aspects d’une problématique bien plus large dont il faut pouvoir saisir les ressorts et les liens en vue de ne pas se tromper d’analyse.


C’est donc à partir de ce constat que nous avons voulu rassembler des analyses qui tâcheront, en multipliant les approches et les points de vue, de fournir à la société civile et aux forces progressistes des éléments d’analyse politique et de langage qui leur permettront de s’engager de manière plus constructive et structurée dans les débats suscités par l’affaire Breivik — et ouvrir les yeux de nos concitoyens aux conséquences concrètes des politiques prônées par une partie conséquente du spectre de la droite actuelle.


Cet article est disponible ici sur la Revue Minorités et sur le Webzine ENARgy.

18.9.11

Un “tribunal” islamique à Anvers? Suite des mauvaises idées de Shariah4Belgium

Le contexte: un récent article publié par le newsserver beliefnet, référant lui même à une info du Het Laatse News, annonce que les musulmans anversois pourront, à leur demande, régler un certain nombre de conflits familiaux au moyen d’un tribunal islamique fonctionnant sur le principe de l’arbitrage extrajudiciaire.


Outre le fait que tout ce qui vient de Shariah4Belgium me donne des boutons, le principe même d’un arbitrage islamique me paraît être une très mauvaise idée.


Tout d’abord, dans le cas précis d’Anvers, cette “cour d’arbitrage islamique” (appelons-la comme cela faute de terme plus approprié) est créé hors de tout cadre légal. L’Échevine anversoise de la diversité la considère comme un modérateur et envisage son rôle positif. C’est dire si l’on peut aller loin dans l’aveuglement béat (ou paternaliste) quand il s’agit des affaires des musulmans.


Le principe même de toute modération voire médiation voire arbitrage qui souhaiterait rendre des décisions ou proposer des solutions valides et validables, c’est de reposer sur un cadre et une méthodologie claire. Jusqu’à nouvel ordre, je n’ai pas entendu que de telles choses existent sur notre continent et je ne compte pas sur les illuminés analphabètes de Shariah4Belgium pour venir avec des propositions en la matière.


Point positif pourriez-vous me dire, c’est que cela existe au grand jour alors que de tels arbitrages ont lieu de toute façon en “stoumeling” à peu près partout. Vrai, mais là, on passe à l’étape suivante, celle d’une quasi institutionnalisation qui augmente la pression sociale sur celles et ceux qui souhaiteraient ne pas s’y soumettre.


Le principe des cours d’arbitrage islamique existe depuis longtemps aux USA, voire en Angleterre, où il a été calqué sur le principe des cours d’arbitrage judaïque, elles-mêmes reposant sur le principe de l’arbitrage commercial. On trouve un deal entre nous et on va le faire valider par la suite par un juge.


Or, en ce qui concerne les courts islamiques, il est prouvé que celles-ci sont particulièrement dysfonctionnelles à deux niveaux:




  1. Les qadis (juges islamiques) et les avocats – outre le fait d’être presque uniquement masculins, un biais de taille – sont en outre bien souvent peu formés aux subtilités de la sharia, en particulier en contexte minoritaire. Les courts sont souvent réduites à l’application automatique de décisions traditionnelles provenant le plus souvent d’un contexte oriental et d’une tradition différente. Inutile de dire qu’en matière de droit familial, ce sont les femmes qui paient le gros de la facture.



  2. Les juges officiels chargés de valider les arbitrages n’ont souvent aucune connaissance de la sharia, sans même parler de ses subtilités, avec pour résultat d’entériner des décisions souvent peu équilibrées.

Tout cela ne manque pas de desservir le principe même de ces cours qui, en soi, ne serait pas inintéressant si l’on avait à disposition des juges et des avocat-e-s éclairé-e-s sachant lire plus loin que certains de leurs traités de droit familial quasi moyenâgeux.


Je n’hésite pas ici à recommander le travail d’une femme remarquable, avocate, elle-même issue d’une longue lignée d’oulémas libanais, Dr. Azizah al-Hibri, qui a fondé aux USA l’organisation Karamah, Muslim Women Lawyers for Human Rights. Se rendant compte de l’impact disproportionné de l’application de la sharia au travers des courts d’arbitrage islamiques sur les femmes, elle a choisi de former juges et avocats en vue d’une application égalitaire des principes de la sharia, pour celles et ceux qui choisissent cette voie de résolution de leurs conflits familiaux – légitime en soi dès lors qu’elle est librement consentie.


On est très loin de cela en Belgique et je pressens la catastrophe. Hors de tout encadrement, en l’absence de formation des juges et des avocats, sans reconnaissance légale impliquant le respect de standards en matière de droits fondamentaux pour les parties qui recourraient à de tels arbitrages, nous allons droit à la faillite. Avec, entre temps, des dégâts humains probablement considérables.


Avis aux musulmans de Belgique et d'ailleurs: Shariah4Belgium est en train de tuer dans l’œuf l’idée même d’un arbitrage islamique. Et ils démontrent une fois de plus avec l’éclat qu’on leur connaît que le salafisme de caniveau est le meilleur ennemi de la communauté musulmane, un frein à l’intégration des musulmans et un dynamiteur de vivre ensemble. A bon entendeur, salut.


Et un dernier tacle pour la route : preuve ultime de la déconnexion de Shariah4Belgium avec son contexte : se revendiquer 4Belgium, en Flandre, et à l’heure de l’évaporation de pays, c’est quand même fortiche. A se demander s’ils savent où ils vivent, non ? A moins qu’ils ne comptent demander au Prince Laurent de devenir leur calife… Mmmmmmh, à voir ;-)

30.4.11

Compte-rendu: « Aimer jusqu’à mourir d’amour », Thérèse et le mystère pascal


Le contexte: il m'arrive de temps en temps de fournir des compte-rendus d'ouvrages dans le domaine des études religieuses. En particulier pour la Revue d'Histoire Ecclésiastique publiée par l'Université Catholique de Louvain. C'est un autre genre, mais j'ai pensé qu'il serait intéressant de partager ces fiches de lecture, autrement réservées à un public confidentiel.

Jean Clapier, « Aimer jusqu’à mourir d’amour », Thérèse et le mystère pascal. (Théologies). Paris, Cerf, 2003. 23,5 x 14,5 cm, 561p. 34 €. ISBN : 2-204-07299-0.

L’ouvrage proposé par J. Clapier marque sans aucun doute un moment important dans le développement des études thérésiennes.

Tout d’abord par son érudition. L’auteur, lui-même carme et théologien, fait preuve d’une intime connaissance de la pensée de la Ste de Lisieux dont il va se charger d’explorer les profondeurs spirituelles en choisissant un angle d’approche novateur : la prégnance du mystère pascal comme ligne de force du développement de la vie mystique de Thérèse jusqu’à la totale consommation de son Offrande d’Amour. L’étude qui nous est présentée ne se contente pas d’une analyse de la seule production littéraire de la sainte. Au contraire, au cours de la première partie de son livre, intitulée Enquête historique, l’auteur s’efforce de restituer, avec beaucoup de clarté et un esprit de synthèse particulièrement pertinent, les contextes spirituels, théologiques, sociaux et familiaux au sein desquels Thérèse a grandi et qui ont indéniablement participé à la configuration de son retour d’Exil. Rien ne semble avoir été négligé : le romantisme ambiant, la pensée salésienne, l’imitatio Christi, la dévotion au Sacré Cœur, la spiritualité victimale, la spiritualité carmélitaine… L’auteur développera avec plus d’attention deux dévotions qui se révéleront être l’expression nodale et sa clé d’interprétation de la spiritualité thérésienne, à savoir les dévotions à l’Enfant-Jésus et à la Sainte Face comme moments essentiels de la kénose divine, début et fin d’une « mission » dans la fragilité, l’impuissance et l’abaissement jusqu’au néant, par Amour.

Le deuxième temps de l’ouvrage de J. Clapier se concentrera sur l’itinéraire pascal de Thérèse. Au travers d’une analyse serrée des écrits de la sainte mise en correspondance avec son parcours de vie, l’auteur démontre avec brio comment le mystère pascal en vient à s’imposer comme le point focal de la mystique thérésienne, suite aux déchirures affectives successives et aux différentes épreuves qui rythmèrent la vie de la sainte, lui permettant à chaque fois de progresser dans sa compréhension expérientielle et intimiste du mystère de la Croix. L’exposé de l’auteur prend pour axe principal la chronologie de l’existence de Thérèse (chap. 4 : fondements et tourments (1873-1886) ; chap. 5 : Percée et abandon dans le mystère du Christ (1887-1893) ; chap. 6 : Maturité et mission (1894-1897)). Il n’hésite cependant pas à faire de fréquents allers-retours dans le temps de l’œuvre écrite elle-même pour mieux mettre en perspective les développements futurs des intuitions précoces de la Ste de Lisieux, ou, inversement, la genèse des lignes de forces de sa pensée théologique, mettant ainsi en valeur la profonde cohérence de son œuvre. C’est certainement là un des attraits de l’exposé de l’auteur, car il parvient à rester clair et à éviter la confusion, risque inhérent à ce genre d’entreprise. La maîtrise que possède l’auteur de son sujet n’en paraît que plus évidente et son ouvrage y puise en partie sa très appréciable dimension pédagogique.

Le troisième volet de l’ouvrage consiste enfin en une approche doctrinale de l’œuvre de Thérèse. Cette section a plus d’un intérêt : elle offre un exposé plus systématique de la doctrine thérésienne en se concentrant sur des points précis, ce que ne pouvait permettre l’approche chronologique favorisée dans la deuxième partie. Ensuite, l’auteur prend soin de mettre en lumière les liens existant entre les « positions » théologiques de Thérèse et celles d’autres théologiens classiques comme Thomas d’Aquin, Augustin ou encore Origène. L’auteur ne manquera cependant pas de s’intéresser aux débats théologiques contemporains (e.g. l’affectivité de Dieu, la thématique de la souffrance,…) et montrera la fécondité actuelle de l’approche thérésienne, tout en prenant soin d’éviter l’écueil consistant à forcer la compréhension des textes de Thérèse par une lecture partielle ou partiale de son œuvre (e.g. la différence entre l’approche kénotique propre à Thérèse et celle développée par certains tenants du kénotisme). L’auteur abordera ainsi les thématiques de la petite voie (chap. 7), de l’affectivité divine (chap. 8), de l’Offrande à l’Amour (chap. 9), de la souffrance (chap. 10) pour conclure avec celle de la rédemption participée (chap. 11), chacune d’entre elles étant, évidemment, liée au mystère pascal et à son aperception par Thérèse. Enfin, J. Clapier démontre l’originalité des intuitions théologiques fondamentales de Thérèse, comme son recentrage sur la Miséricorde en une époque fascinée par l’implacabilité de la Justice divine, sa redécouverte du Cœur de l’Eglise,…

Cette étude constitue encore un moment important des études thérésiennes par la clarté de son style et de sa structuration, comme nous avons eu l’occasion de le signaler. Le style employé par l’auteur est limpide et manifestement adressé à un large public averti, sans pour autant sacrifier au simplisme et au raccourci facile. Bien au contraire, l’auteur, par l’approche phénoménologique particulière qu’il développe, laisse véritablement surgir la force de la spiritualité thérésienne tout en donnant les outils nécessaires à sa juste appréciation (théologique, psychologique, mystique, historique). Bien que l’on devine la profonde sympathie de l’auteur pour l’objet de son étude, le soin qu’il prend à en exposer les aspects les plus difficiles voire controversés (l’« amour » de la souffrance [p. 450], l’« étrange maladie », son doute concernant le Ciel…) en fait un travail très équilibré, loin de tout esprit partisan.

L’aspect éminemment pédagogique de son ouvrage ressort également de la présence de nombreuses notes infrapaginales multipliant les références bibliographiques et les commentaires, et mentionnant voire discutant avec beaucoup d’à-propos les différentes thèses développées sur la pensée thérésienne, sans pour autant alourdir la lecture de l’exposé. On signalera également la présence d’une bibliographie sélective particulièrement riche et bien ordonnée (par ordre chronologique) permettant de suivre les développements multiples et foisonnants des études thérésiennes, mais aussi théologiques, philosophiques et bibliques, tant passés que contemporains. L’index des auteurs est utile, mais on peut cependant regretter l’absence d’un index des notions et termes techniques qui aurait pu conférer un intérêt supplémentaire à la « navigation » dans cet ouvrage. Une table des matières bien détaillée compense de façon utile ce petit manque qui n’enlève cependant rien aux mérites de ce livre.

Il aurait également été enrichissant, qui plus est à l’heure de l’œcuménisme, que l’auteur recoure aux expériences spirituelles développées dans des mystiques non chrétiennes. A titre d’exemple, considérons l’épreuve de la foi traversée par Thérèse. Alors que l’auteur n’hésite pas à faire appel aux approches psychanalytiques pour tenter d’éclairer l’après Pâques de 1896 (et ce, en dépit de leur incapacité à appréhender le cœur de la relation âme-Dieu, nécessairement en dehors de leur champ d’études), on peut s’étonner qu’il ne semble pas envisager la fécondité d’une possible approche interreligieuse. Si, définitivement, une lecture honnête des derniers écrits de Thérèse ne peut que contredire son prétendu athéisme, on ne peut s’empêcher de faire un rapprochement saisissant – au-delà même de la thématisation de la nuit telle qu’elle se rencontre chez St Jean de la Croix – avec la progression dans le renoncement telle qu’elle fut expérimentée par certains mystiques musulmans[1]. Selon eux, Thérèse serait passée du renoncement à l’ici-bas (tark al-dunyâ, caractérisé par le désir de l’Au-delà), première étape de la vie mystique, au renoncement à l’Au-delà (tark al-akhîra, caractérisé par le renoncement au désir même de l’Au-delà laissant place au seul désir de Dieu), seconde étape menant finalement à la pure présence en Dieu, troisième étape caractérisée par le renoncement au renoncement (tark al-tark) au sein de laquelle la mystique s’abandonne totalement au pur Vouloir divin. Comment lire autrement cette remarque de Thérèse, en fin de vie, saisissant l’ampleur de la purification que lui a permis d’atteindre la souffrance de cette épreuve de la foi que son Epoux lui imposa : « Jésus m’a fait la grâce de n’être pas plus attachée aux biens de l’esprit et du cœur qu’à ceux de la terre » (p. 312). Face à cela, l’obscure résurgence du syndrome d’abandon proposée par certains pour tenter d’expliquer cette progression spirituelle paraît bien dérisoire.

D’autres épisodes de la vie de Thérèse pourraient également bénéficier de tels éclairages qui permettraient, sans aucun doute, de densifier encore notre appréciation et notre compréhension de sa progression mystique et de sa quête d’anéantissement dans l’Amour absolu.

Pour conclure, J. Clapier ne fait pas, ici, seulement œuvre de théologien : la richesse de sa recherche et la place qu’il laisse à l’expression propre de Thérèse fait de la lecture de son ouvrage une véritable expérience spirituelle.

M. Privot

Publié dans

Revue d’Histoire Ecclésiastique, 2005/3-4, pp. 1073-1076.


[1] Voir A. Schimmel, Le Soufisme ou les dimensions mystiques de l’Islam, Paris, Cerf, 1996.


27.3.11

Le paradoxe d’HEMA : exclure pour mieux intégrer ?

Une fois n’est pas coutume, le foulard est revenu à l’avant de la scène, non pas dans l’enseignement mais dans l’entreprise, avec la décision d’un magasin de la chaîne HEMA de rompre le contrat d’une employée portant le foulard, suite aux plaintes de quelques clients.

Par Michael Privot, Irène Kaufer, Farida Tahar et Stéphane Jonlet

pour Tayush*, groupe de réflexion pour un pluralisme actif

L’événement paraît anodin : une femme portant le foulard est priée de l’abandonner aux portes de son lieu de travail au risque de perdre son emploi. Elle refuse au nom du droit constitutionnel fondamental de tout individu de manifester ses convictions en privé comme en public, puis est licenciée au nom du « droit coutumier » du client-roi. Que faire ? De toute évidence, il faudrait appliquer le principe juridique le plus élevé en pareilles circonstances. Mais, vu que l’objet du litige est un foulard, le bon sens s’évanouit et l’employeur – un magasin de la chaîne HEMA – enfreint la loi en cédant devant les souhaits discriminatoires de ses clients.

Plus interpellante, l’attitude de Randstad, son employeur direct, qui n’infirme pas la décision alors que, par ailleurs, il s'enorgueillit d’appliquer un code sectoriel volontaire de bonne conduite en matière de lutte contre les discriminations. En clair, si un client demande à une agence Randstad de « filtrer » la main d’œuvre qu’elle lui envoie selon des critères non pertinents (genre, ethnicité…), celle-ci est tenue d’informer son client que cela est illégal et de tenter de le faire changer d’avis. Si le client s’obstine, l’agence se doit de refuser de traiter avec lui.

Cependant, ce code ne sert la plupart du temps qu’à décorer les murs des agences, comme Randstad nous le démontre brillamment. Bien que la discrimination sur base des convictions religieuses soit rigoureusement interdite par la loi depuis plus d’une décennie, un grand nombre d'entreprises font systématiquement primer leur intérêt économique sur l’éthique. Cela démontre une fois de plus que, pour progresser vers une réelle égalité des chances, on ne peut compter sur une hypothétique autorégulation des entreprises ; les autorités publiques doivent leur imposer des limites claires.

Plus alarmant encore, cette affaire ouvre une double brèche dans les fondations mêmes du droit à l’égalité de toutes et tous. La première, c’est que le débat sur le foulard envahit maintenant la sphère privée avec des conséquences potentiellement incalculables pour l'accès au marché du travail des personnes issues de minorités ethniques, culturelles ou religieuses. Au-delà de la légitimité ou non de la prise en compte de l’apparence d’un fonctionnaire dans l’exercice d’une fonction d’autorité, la fermeture de l’emploi privé que laisse augurer la récente décision d’HEMA et de Randstad s’annonce catastrophique. En effet, nombre d’individus compétents et motivés, de toutes convictions ou horizons culturels confondus, vont se retrouver marginalisés car ne rentrant pas dans les standards étriqués d’un marché de l’emploi essentiellement blanc-bleu-belge.

Ce n’est pas en écartant du marché de l’emploi, pour des raisons non liées à leurs compétences, des segments importants de la population active que la Belgique parviendra à réaliser l’objectif européen pour 2020 de faire bénéficier d’un travail 75% de sa population active. Pire, l'exclusion de nombreux travailleurs qualifiés issus de minorités ethno-culturelles risque de gâcher pour longtemps leurs aspirations à contribuer au bien-être global de la société.

La seconde, c’est que si l’interdiction préventive du port du foulard par peur de remarques négatives de la part de clients ne date pas d’hier, elle ne fut jamais officialisée comme motif de rupture d’un contrat. Cet aplatissement sans précédent devant les désirs du client-roi est particulièrement interpellant ! Où va-t-on placer la limite ? Si, en suivant cette logique, un client fait des remarques sur un employé noir ou arabe, ou encore gay, de sexe féminin ou ayant un handicap visible… Absurde ! Vraiment ? Ayons conscience de ce qu’implique dans l’organisation sociale le regard intolérant des autres. Comment oser aujourd’hui renvoyer à la face des minorités leur manque d’intégration quand on leur ferme les portes de l’émancipation par le travail les unes après les autres ? C’est d’autant plus absurde que cette nouvelle offensive contre le foulard ne touche évidemment que les femmes, au nom d’une « émancipation » qu’on bloque en les privant de l’accès à l’emploi, donc à l’indépendance économique et la possibilité de faire librement leurs choix de vie !

La question est grave, car elle interroge en profondeur le modèle de société que nous essayons de bâtir ensemble. Et nous ne voulons pas d’une société qui manque de souffle, de vision, de courage et se racrapote sur elle-même. Se priver des ressources de la diversité, c’est se condamner au délitement à plus ou moins brève échéance. Les sociétés les plus dynamiques ont toujours été celles qui ont réuni leur diversité autour d’un projet commun et non celles qui ont extirpé de leur sein la différence.

*Tayush est un groupe de réflexion qui réunit des femmes et des hommes provenant ou non de l’immigration et relevant de traditions et de convictions philosophiques diverses, qui partagent le même projet d’une démocratie inclusive, ouverte à la diversité culturelle et religieuse. (Adresse de contact : groupe.tayush@gmail.com)

15.3.11

Verviers, Ville des mots : “Fermons les yeux, vivons heureux!”

On se souvient tous de la polémique qui a secoué le landernau politique, médiatique et communautaire verviétois il y a deux-trois semaines, à la suite des chiffres communiqués par la majorité communale PS-MR en matière de pauvreté et de présence des personnes d’origine étrangère dans notre commune.

Bien que la poussière ne soit pas encore tout à fait retombée, il est déjà évident que les appréciations respectives des différents partis politiques sont assez différentes quant à la réalité de la situation. Le PS se veut résolument optimiste, à savoir qu’à taille égale, Verviers n’est ni pire ni meilleure que des villes comme La Louvière ou Seraing – personnellement, je ne suis pas sûr qu’il faille s’en réjouir. Quant aux autres partis, y compris le MR qui s’est légèrement désolidarisé de sa communication initiale en compagnie du PS, ils jugent la situation beaucoup plus problématique et dénoncent le manque d’investissement dans le social et l’absence de vision cohérente de la majorité sur la manière d’aborder ces problèmes.

La situation est évidemment complexe et requiert une véritable stratégie de consensus, non partisane, alliant de manière complexe différents types d’outils et de politiques, à contre-courant de l’approche parcellaire, voire atomisée ou par saupoudrage qui règne en maître aujourd’hui. Sans parler de l’imbroglio institutionnel dans la répartition des compétences entre les niveaux locaux, provinciaux, régionaux et nationaux, chacun ayant ses intérêts et ses priorités respectives. Au-delà d’un même d’un programme électoral, il faut une véritable volonté de mettre tous les acteurs concernés autour de la table et de les faire collaborer ensemble, ce qui est loin d’être évident quand certains préfèrent faire passer leurs intérêts personnels, organisationnels ou partisans avant le bien collectif. Ce n’est bien entendu pas une raison pour baisser les bras, mais une façon de reconnaître que, quelle que sera l’équipe au pouvoir, la tâche sera très loin d’être aisée.

Tout cela pour dire qu’à la lumière de ce contexte, j’ai été particulièrement choqué par le slogan venu récemment s’afficher – pour ajouter l’infamie à l’insulte – sur le rond point des « Droits de l’Homme » (vous avez bien lu !) : « Fermons les yeux, vivons heureux ! ».

Quel programme !

· La pauvreté vous dérange ? Fermez les yeux, vivez heureux !

· Le racisme et les discriminations contre les personnes d’origine étrangère vous empêchent de dormir ? Fermez les yeux, vivez heureux !

· L’inégalité et les violences envers les femmes à tous les étages de la société vous enragent ? Fermez les yeux, vivez heureux !

· Les massacres et les violations des droits de l’homme en Lybie vous dégoûtent ? Fermez les yeux, vivez heureux !

· La liste pourrait s’allonger indéfiniment, mais fermez les yeux, vivez heureux !

Pour tout vous avouer, je ne sais pas s’il faut prendre ce slogan comme du second ou du troisième degré, comme du cynisme froid, ou tout simplement comme la preuve d’une stupidité sans bornes. Comment ne pas se rendre compte du poids de ces mots quand notre Ville les célèbre ? Fermez les yeux braves gens, restez dans la torpeur et la somnolence de l’ignorance pendant que nous violons en paix les droits des autres ! Avant de s’occuper des vôtres, bien sûr, mais chuuuut, fermez les yeux, vivez heureux ! Encore un peu…

A l’heure où se désagrègent les droits sociaux et où l’on ne doit qu’à nos querelles institutionnelles d’échapper à une attaque en règle contre ces droits dans l’espoir de s’attirer les bonnes grâces des agences de notation internationales, fermer les yeux ne constitue même plus une échappatoire bon marché vers un bonheur illusoire, mais un véritable attentat à notre dignité d’êtres humains.

Les Droits de l’Homme ne vivent que parce qu’ils sont portés par des femmes et des hommes debout, qui se lèvent – les yeux et le cœur grand ouverts – contre l’adversité, les inégalités, l’oppression, mais aussi l’oubli et les tentatives de diversion.

J’en appelle donc la Ville à remplacer ce slogan désastreux par le suivant : « Ouvrons les yeux, soyons heureux ! », ou toute autre meilleure formulation allant dans ce sens. C’est un minimum. Sur le rond point des Droits de l’Homme.

Michael Privot

24.2.11

Les musulmans de Verviers "fâchés contre eux?" Non!


Qu'ils soient une fois plus un enjeu, oui!

Depuis la semaine dernière, ça buzze dur en bords de Vesdre.

La raison: un bourgmestre socialiste souhaitant briguer un 3ème mandat et se rendant compte que la réputation de sa Ville s'est dégradée au-delà du raisonnable tente de remettre - à juste titre - les pendules à l'heure: à ville de taille comparable, Verviers n'est ni plus pauvre, ni plus une ville d'étrangers.

Un truc banal? Non, ça tire dans tous les coins: le PS tente de se refaire une image auprès des minorités et des "pauvres" à un an des communales, le Cdh répond en essayant de ménager tout le monde y compris son électorat de droite sur la question et le MR, en partie associé à la communication du Bourgmestre qui par la suite s'avère être non assumée, voit son président se faire dézinguer sec pour avoir malmené le bourgmestre et ses collègues en public - tout en laissant des propos fleurtant avec le racisme être exprimé sur un fil de discussion initié sur sa page Facebook. Pas que ça déplaise au MR, mais quand même, ça ne fait pas très libéral. Au milieu de tout ça, des médias locaux qui tentent très maladroitement de déconstruire des discours avec pour résultats de jeter de l'huile sur le feu et quelques musulmans qui tirent au boulet rouge sur tout ce qui bouge en ratant l'occasion d'avoir une analyse un peu plus fine de la situation.

Résultat final: alors que l'on aurait dû parler pauvreté et intégration, tout le débat se focalise sur les musulmans et leur impossible assimilation chez les mangeurs de tarte au riz. Un vrai "vautchon". Avec le quotidien Le Jour qui titre ce 22 février "Les musulmans sont fâchés contre eux" (avec en photo, un chef de file du Cdh et un du MR).

Alors que le quotidien Le Jour s'est déjà montré plus fin dans ses reportages sur les musulmans de Verviers qui comptent en leur sein de multiples nationalités (marocaine, turque, belge converti, somalienne, tchètchène, albanaise, ouighoure..), on peut se demander quelle mouche a piqué ses rédacteurs pour relayer le communiqué de presse de quelques jeunes musulmans proactifs en titrant "LES musulmans". Si ces jeunes en question font d'habitude de l'excellent travail (mélange à la fois de pertinence et d'impertinence ) - ah vous savez la jeunesse ! - il n'en reste pas moins qu'ils sont loin d'être la voix unique des musulmans de Verviers. Preuve : quelques jours avant, un autre responsable de la communauté, dans le journal la Meuse, avait tenu des propos plus nuancés et une volonté d'instaurer un vrai dialogue sur base de ce qui fonctionne déjà. Mais en ces temps difficiles, seuls les discours les plus durs restent dans les mémoires. Ces jeunes de Musulmans Proactifs ont à raison participé au débat démocratique de leur point de vue, mais ne mettons pas tout le monde dans le même sac. Même si bon nombre de musulmans ont eu des aigreurs d'estomac à la lecture de certaines positions politiques, ils sont néanmoins capables d'une analyse plus nuancée et tentent de ne pas tomber dans le piège d'une approche clivante de la situation à ce point où, au lieu d'être des acteurs apportant des solutions, ils deviennent des enjeux du débat, objets politiques que chaque parti utilisera pour conforter son électorat.

En ce sens, ces jeunes musulmans se sont rendus de leur plein gré là où l'on voulaient qu'ils aillent: soutenir franco le PS (tous les musulmans derrière le PS!) et renforcer dans ses préjugés anti-étrangers et anti-pauvres la base de la (petite) bourgeoise blanche et +/- conservatrice sur lequel lorgne d'autres partis qui pourront après mieux rassurer leur électorat off the record: non, non, nous ne soutenons pas ces musulmans, houlalaaa, dangereux!

Retour à la case départ pour beaucoup d'entre nous qui, depuis plusieurs années, avaient tenté d'établir des relations plus ou moins intéressantes et constructives avec tous les partis, car les problématiques de la pauvreté, de l'intégration, de la lutte contre les discriminations (contre les musulmans ou non) sont des problématiques transversales dépassant les clivages partisans, même si les solutions à apporter, certes, varient selon les options politiques. Mais cela, ça ne fait pas la une des journaux ! Trop complexe, certainement…

En conclusion, le débat a complètement dérapé. Et l'on peut s'interroger sur la responsabilité des médias en cette affaire, du journal le Jour en particulier quant au coup d'accélérateur qu'il vient de lui mettre, surtout à la lecture du billet de Gery Eykerman sur la condamnation de Eric Zemmour pour incitation à la haine raciale.

Ce n’est pas une digression inutile de s’y attarder un instant. Non, Monsieur Eykerman, ce ne sont pas des "associations détentrices du politiquement correct" qui ont traîné M. Zemmour en justice, mais des associations qui ont forgé leur respectabilité dans la lutte contre l'anti-sémitisme et toutes les autres de formes de racisme. Rappelons que, en France comme en Belgique, l'incitation à la haine raciale, n'est pas une opinion, mais un délit, car l'histoire est remplie à vomir des conséquences désastreuses de tels "dérapages". M. Zemmour n'a pas dit qu'une "connerie" , mais en légitimant le fait que des employeurs puisse refuser d'embaucher des gens sur le seul critère de leur ethnicité, il a sciemment incité à la haine de l'autre, en minant par la même les valeurs fondatrices de notre constitution et du projet européen.

Il ne s'agit pas ici de simple liberté d'expression, M. Eykerman, car de l'autre côté, il y a des gens qui sont non seulement exclus de la société, grâce à ces "conneries", mais qui se font casser la gueule voire assassiner - simplement parce que la couleur de leur tronche ne reviendrait pas à un mec qui passerait par là. Inciter à la haine de l'autre, ce n'est pas comme détester la pluie qui tombe, il y a des conséquences directes sur la vie concrète de milliers, voire de millions de personnes. Mais il est que lorsque l'on est un blanc privilégié avec une demi colonne à remplir dans le Jour, il y a des réalités sociales que l'on ne peut pas toujours percevoir. On a au moins la décence de se taire.

La couverture tapageuse de ce mardi, affichant en première page de manière caricaturale LES musulmans dans une posture d’opposition s'inscrirait-elle dans une ligne éditoriale plus cohérente qu’on ne l'imagine? La question est posée, mais l'impact sur la population majoritaire est claire: pour qui ces musulmans ce prennent-ils, ces autres, pour se permettre d'être fâchés? "Qu'ils retournent dans leur pays!" Et tralala, c'est reparti!!!!! Parlons donc de la responsabilité sociale des médias à l'occasion de cette affaire.

Et les politiques embraient, bien sûr, c'est plus facile que de traiter du fond: quelles politiques d'inclusion mettre en place avec les moyens du bord? comment faire le lien avec la précarisation grandissante des classes moyennes et défavorisées (le sujet d'un reportage d'arte le même jour, comme quoi les journalistes ne lisent pas les papiers de leurs collègues au sein d'une même rédaction)? Quelles méthodes utiliser pour déconstruire ensemble des logiques d'exclusion réciproques? Comment parler un même langage au-delà de nos cultures d'origine? Comment faire de la diversité de Verviers un atout plutôt qu'une faiblesse? Comment préparer le devenir à très court terme de Verviers comme une "minority majority city"? Il y a des solutions à tous ces problèmes, mises en oeuvres dans différentes villes européennes qui font face à des problématiques similaires (voir les conclusions du réseau CLIP ou encore des Cities Against Racism pour ne citer que ces deux-là), mais il faut plus que des discours et construire concrètement la vision d'un avenir partagé - défini de façon collective avec tous les acteurs de notre Ville - et non un simple constat statistique, des ratiocinations sur les perceptions réciproques sans proposition constructives ou croire encore que tous ces "étrangers" finiront par partir un jour. Il sont ici, ils resteront ici et c'est ici que, tous ensemble, il nous faudra construire notre avenir... et celui de nos enfants !

Seul point positif de l'histoire, la carte politique s'est un peu décantée. Et les musulmans veulent faire passer le message qu'ils veulent être entendus dans le débat public tout comme ils demandent que les responsables politiques puissent s'exprimer sur la question de la place de l'islam et des musulmans dans la cité, et ce publiquement. Cette expression nouvelle de ceux qu'on n'entendait pas avant, et que certains essaient de façon simpliste de disqualifier de communautaristes ou de racistes pour mieux ne pas y répondre, est en fin de compte l'affirmation de leur citoyenneté pleine et entière à la vie sociale et politique. Un vrai signe d'intégration, quoi ! Même s'il va falloir affiner à l'avenir la forme pour mieux se faire entendre sur le fond. Et cette saga aura eu un mérite : à savoir que chaque parti a mis à jour ses lignes de fracture internes sur les questions d'égalité. Honnêtement, entre les idéaux affichés et la réalité des réflexions en interne, il y a un sacré décalage, tous bords confondus.

Verviers n’a d’autre choix que de faire de sa diversité un atout. Et plus qu’un non choix, cela doit devenir un vrai challenge. Un vrai défi d'avenir ! Un vrai travail d'intérêt général et de salubrité publique !

Michael Privot

Belge de souche et citoyen verviétois

Islamologue

4.2.11

Hani Ramadan, l’antéchrist et l’humour belge…

Hani Ramadan provoque une tempête dans un verre d’eau par une conférence qu’il va donner à Bruxelles et intitulée de manière provocatrice « L'Islam et la dérive de l'Occident : la civilisation du dajjal, l'antéchrist ». Bien que je trouve son argumentaire affligeant d’un point de vue intellectuel, mon avis sur cette polémique est le suivant :

Mais comme certains polémistes sont docteurs ès détection de la « poutre dans l’œil du voisin à défaut de voir celle dans leur propre œil » pour gentiment paraphraser LE Christ cette fois-ci, et que l’Autre demeure le miroir au moyen duquel on ne devrait cesser de s’analyser, je trouve particulièrement utile de faire le parallèle avec la couverture du Point de cette semaine.

Silence radio de ce côté-là. Et pourtant, l’argumentaire est aussi limité, réducteur et caricatural. Il repousse un peu plus tout espoir d’une compréhension mutuelle apaisée, au-delà des stéréotypes et des préjugés.

L’un valant l’autre en matière d’analyse simpliste et tordue, est-il encore possible aujourd’hui de faire le pari de l’intelligence et de s’intéresser aux problématiques de fond : lutte pour l’égalité substantielle de tou-te-s, déconstruction des stéréotypes respectifs, inclusion sociale, lutte contre la pauvreté, recherche du bonheur… ? Pour ne citer que quelques sujets qui peuvent occuper toute une vie.

Franchement, je reste songeur...

2.2.11

Quand Monsieur Chérif "redresse" les torts...

Par Cédric Baylocq, doctorant en anthropologie, chercheur associé au Centre Jacques Berque, et Michaël Privot, docteur en philosophie islamique classique, coauteurs de « Profession imâm ». Entretien avec Tareq Oubrou (Albin Michel, 2009)

Le contexte: Le samedi 29 mai 2010, le site Saphirnews mettait en ligne un entretien avec l’imâm Tareq Oubrou portant sur la question de l’homosexualité analysée d’un point de vue religieux. Cet entretien faisait suite à la signature par l’imâm bordelais d’un appel contre l’homophobie paru dans le journal Le Monde du 17 mars de la même année, cosigné avec d’autres hommes de religion et philosophes.


Sur le fil de commentaires, on pouvait trouver plusieurs réactions de Monsieur Mustapha Chérif, philosophe et théologien, qui se présente sur son site comme « soucieux du vivre ensemble ».


Il est fort surprenant que Monsieur Chérif (dont on trouvera copie des remarques ci-dessous) ne fasse pas preuve d'un peu plus de rigueur dans la manière dont il reprend les propos de l'imâm Tareq Oubrou, sur cette question sensible de l’homosexualité du point de vue de la religion musulmane (aussi sensible que dans les autres religions du Livre, d’ailleurs). De la part d’individus qui n'auraient pas reçu de l’école les instruments propres à distinguer et traiter rationnellement les différents termes d'une proposition, cela serait relativement compréhensible, mais que cela soit le fait d'un Professeur des Universités montre bien que quand l’idéologique et l’émotionnel prennent le pas, la raison trépasse.


En somme, ce que dit Mr Oubrou est pourtant assez simple à comprendre : 1) l’homosexualité est une pratique qui n'est pas moralement acceptée par l'islam et 2) cela ne doit toutefois pas conduire à exercer des violences vis-à-vis des individus qui connaissent cette orientation. Que Monsieur Chérif ne soit pas d’accord avec un des arguments développés par l’imâm Oubrou pour recontextualiser l’approche de l’homosexualité dans la jurisprudence islamique classique (« Celui qui ne respecte pas ses parents ou qui trompe sa femme commet une faute plus grave que l'homosexualité ») est une chose, mais qu’il laisse malhonnêtement entendre en conséquence que Tareq Oubrou nierait que sa religion considère cette pratique comme un péché en est une autre.


Les « libéraux » trouveront bien sûr la position de Mr Oubrou insuffisamment courageuse voire même encore trop stigmatisante (« l’homosexualité n'est pas moralement acceptable »). Les « conservateurs » trouveront quant à eux sa position trop accommodante (« ne pas intimider ou insulter les homosexuels... »). Là n’est pas le problème. Mais à tout le moins Mr Chérif pourrait-il respecter le contenu des propos et les nuances que Mr Oubrou essaye d’apporter dans ce débat que l’on veut ériger, à côté du foulard, comme un autre point de contentieux entre les musulmans et les franges libérales des sociétés occidentales.


Mr Oubrou a pourtant été, comme à son habitude, à la fois clair et circonspect. Ainsi, prend-t-il bien soin de rappeler les principes de l’éthique islamique majoritaire sur cette question au début ET à la fin de l'entretien :


« La position de principe de l’islam est la suivante : le seul rapport acceptable en matière de sexualité est celui qui s’effectue entre deux sexes différents dans le cadre légal du mariage. Comme les autres religions, l’islam ne considère pas l’homosexualité comme une pratique sexuelle moralement acceptable. Elle est considérée comme une faute morale, un péché. »


Insuffisant? La fin de l'interview:


« C’est pour cela que j’anticipe, en disant qu’il ne faut pas agresser, insulter, mépriser les homosexuels, sous prétexte que leurs pratiques ne sont pas approuvées par la religion. Mais tolérer ne veut pas dire approuver... Il faut développer un savoir-vivre, le vivre-ensemble, où existe le respect mutuel qui préserve la paix civile, l'ordre public, au-delà de nos convictions et nos pratiques » (ibid.).


« La non-agression », « le respect mutuel », « le vivre-ensemble ». Quelle audace !? Quelle insolence de la part de Tareq Oubrou !? Rappeler qu’il ne saurait y avoir de légitimité religieuse à maltraiter ou brimer un individu qui ferait preuve d’une autre orientation sexuelle paraîtrait donc excessivement révolutionnaire aux yeux de Mustapha Chérif.


On constate en effet que Mr Chérif s’offusque de voir un imâm qualifier l’homosexualité d’ « orientation sexuelle », lui qui préfère la bonne vieille catégorie de « maladie[1] » (il emploie même les qualificatifs de « bestial » et d’« inhumain ») pour faire des homosexuels des déviants et les disqualifier de toute quête de spiritualité qui est pourtant un droit fondamental pour tout être humain, indépendamment de son orientation sexuelle. Plus grave encore, Monsieur Chérif prétend s’immiscer dans la relation intime entre tout individu et son Seigneur et s’ériger subrepticement en recteur des consciences, en dispensateur d’autorisation en matière de croire, empiétant lourdement sur une prérogative exclusive de Dieu si l’on se place dans la tradition théologique islamique la plus profonde. Un péché certes subtil mais d’une gravité extrême pour tout prétendant au rang de théologien.


Plus largement, cela pose la question de savoir à quel type de vivre-ensemble Mr Chérif fait-il au juste référence ? A celui d’un monde rempli de chrétiens, musulmans et juifs qui feraient leur unité à l’encontre des homosexuels ? Le vivre-ensemble serait-il purement hétéronormé dans la « philosophie » chérifienne ? Mais où caser dans cet univers chérifien ces gens prétendument « hors-norme » qui représenteraient jusqu’à 10% de la population globale ? Le bannissement unilatéral de toute communauté de foi à laquelle certains gays et lesbiennes s’identifient serait-il le seul horizon auxquels ceux-ci pourraient prétendre comme Mr Chérif semble le suggérer ? Lire d’ailleurs, comme il le fait, l’épisode de Sodome et Gomorrhe sous l’angle unique d’une condamnation sans détour de l’homosexualité est également un peu court. Les leçons scripturaires sont bien plus subtiles (nous n’avons malheureusement pas le temps de les développer ici, et les laisserons pour un article ultérieur) et ouvrent la voie à une approche spirituelle apaisée non pas en phase avec l’air du temps – qui est à la stigmatisation tous azimuts – mais avec une lecture positive de la Justice divine, ce qui est très différent. Et nous réitérons ici l’approche oubrousienne affirmant qu’il peut y avoir concomitamment condamnation du point de vue de la morale religieuse musulmane (akhlâq), appel à la non-violence et interdiction totale de la vindicte.


Ainsi, c'est plutôt Monsieur Mustapha Chérif qui se fourvoie, et non pas Mr Oubrou, quand il déverse à l’encontre ce dernier un "takfîr soft" que rien, dans cet entretien ne justifie.


A côté de cela, on attend toujours que le chantre de la tolérance et du vivre-ensemble – pourtant intarissable sur les déclarations de Mme Angela Merkel à propos de la « faillite de l’intégration » à l’allemande – se prononce sur les violences antichinoises en Algérie ou encore sur les agressions des femmes d’Hassi Messaoud en 2010 (après la flambée de violence de 2001[2]). On aurait attendu également que celui qui allait au devant du Pape Benoît XVI à la suite de sa conférence de Ratisbonne dise un mot sur les condamnées à la prison en Algérie parce qu’elles ne jeûnaient pas durant le Ramadan. On aurait attendu en outre que celui qui réclame à juste titre tolérance et liberté religieuse pour les minorités musulmanes d’Europe, se lève avec la même vigueur quand la librairie d’un Algérien chrétien est détruite ou que des protestants autochtones sont menacés. Il ne risquerait pourtant rien (si ce n’est de faire preuve de cohérence intellectuelle), la Constitution algérienne garantissant la liberté de culte, aux dernières nouvelles…


Le comble est atteint quand Mr Chérif écrit : « Tareq Oubrou qui est une personne respectable et de bonne intention se trompe et se fourvoie totalement en voulant donner l'image d'un islam tolérant (nous soulignons) ». Quel aveu pour quelqu’un qui fait de profession tolérance de dire que l’un de ses coreligionnaires « se fourvoie », quand il veut donner de sa religion une « image » de tolérance ! Veuillez vous taire, vous musulmans qui, de par le monde, rendez compatible votre foi avec l’acceptation de l’autre ! Mustapha Chérif veille à ce que votre tolérance ne déborde pas le cadre de ses propres conceptions étriquées.


Le vivre-ensemble ne se résume pas pour nous à se gargariser de belles paroles et considérations pour faire bonne figure dans les multiples fora interculturels et religieux dans lesquels Mr Chérif se produit sans véritablement « mouiller sa chemise ». Chacun reconnaîtra qu’il est en revanche un brin plus ardu de choisir la voie d’une pastorale populaire et d’être confronté aux multiples responsabilités d’un imâm profondément engagé sur le terrain, aimant sa religion, sa communauté et sa société, et de répondre aux questions qu’elle se pose immanquablement[3]. Bien plus qu’il ne s’agit de vivre ou de se confondre en rodomontades avec des « Gens du Livre » de bonne tenue, il s’agit d’envisager de vivre concrètement, au quotidien, avec celles et ceux qui représentent pour chacun d’entre nous la véritable altérité – positive comme négative. Et d’outiller conséquemment, tant au niveau conceptuel que pratique, les membres de telle ou telle autre communauté confessionnelle pour les amener à vivre paisiblement leur foi au sein de leur société, dans la lumière de leur seul Seigneur et à l’abri des anathèmes des représentants autoproclamés des nouvelles hisba qui ne cessent de champignonner.


Là est peut-être une des clés profondes du travail de Mr Oubrou, qui échappe curieusement à un Professeur des Universités, philosophe et théologien, qui a fait carrière de tolérance. Si un intellectuel musulman en est à ce niveau de compréhension d’une interview d’une page et demi, il ne faut alors pas s’étonner que des incompréhensions plus radicales encore puissent advenir à une échelle moins favorisée socialement et intellectuellement. Et qu’une opinion somme toute assez simple de rappel de l’interdit moral accompagnée d’un impératif de tolérance (quoique « tolérer ne veut pas dire approuver... » pour coller aux propos de Tareq Oubrou), soit transformée en opinion « favorable à l’homosexualité » par réductionnisme (ou manipulation ?)


Cédric Baylocq/Michaël Privot


http://www.saphirnews.com/Islam-homosexualite-et-homophobie-vus-par-Tareq-Oubrou_a11544.html


1.Posté par Mustapha Cherif le 29/05/2010 01:24


Cette affirmation de mon Ami Tareq est fausse et infondée: "i[Celui qui ne respecte pas ses parents ou qui trompe sa femme commet une faute plus grave que l'homosexualité ]" L'homosexualité est un des plus graves péchés qui entrainent deshumanisation, dénaturation et condamnation Divine. Nombre de versets nous décrivent le chatiment des homosexuels ( sodome et ghomore...ect) Etre homosexuel c'est s'exclure de fait de la communauté. Prier, jeuner ect ...n'ont plus de valeur. C'est vraiment déraper gravement que de dire : "[Je ne veux pas que les homosexuels de confession musulmane désespèrent de leur religion. Ils peuvent avoir une spiritualité et des pratiques dans d'autres champs cultuels et moraux de l'islam. Ils n’ont pas à faire le choix entre l’homosexualité et l’islam.] Il y a incompatibilité totale entre des actes immoraux , dégradants, contre-natures et l'islam . Il faut donc choisir. Inutile de tromper les gens sous pretexte que l'air du temps est favorable à des pratiques immorales et contre-natures que certains dénoment hypocritement "orientation sexuelle" . Il faut arrettez de glisser de concéssions en concéssions, pour aboutir à des contre vérités. Réprouver absolument l'homoséxualité ne signifie pas pratiquer une violence contre une catégorie, mais exprimer un principe éthique et religieux intangible: l'homosexualité est une faute trés grave, immonde et inhumain.


16.Posté par Mustapha Cherif le 30/05/2010 15:39


En effet le licite est clair et l'illicite tout autant, et le musulman est celui dont on doit craindre ni la main, ni la parole, chacun est libre et doit assumer ses responsabilités. Le musulman doit recommander le bien et dénoncer le mal. Tareq Oubrou qui est une personne respectable et de bonne intention se trompe et se fourvoie totalement en voulant donner l'image d'un islam tolérant. Il faut au contraire être franc et clair , ne pas tromper les gens : être homosexuel est plus que détesté par Dieu, c'est une pratique hautement condamné sans l'ombre d'un doute. C'est grave, délirant et absurde de dire que l'on peut être homosexuel et musulman , pourquoi pas assassin et musulman, pervers sadique et musulman, inceste et musulman ect ....Il faut arrêtez la folie, et de distiller de la confusion. Dieu n' a besoin ni de nos salates, ni de nos zakates, ni de nos hajjs , si on porte atteinte aux bases de la vie. Certes on comprend que l'homosexualité soit une maladie et une source de souffrance, et que nul ne doit être agresser, mais cela ne peut être une excuse pour accepter ce mal ou le banaliser. Un mal est un mal, une perversion immorale contre nature et dégradante est une perversion immorale contre nature et dégradante. Il ne s'agit pas de tolérance ou d'intolérance mais d'humanité à sauvegarder , de principe éthique et moral à défendre contre toutes les dérives. Si on cède sur celui, il n'y aura plus d'humanité , ni de morale , ni de sens à la vie. Il faut arrêtez de délirer.choisir entre islam ou homosexualité, entre comportement pervers et islam, entre attitude humaine et bestiale , le choix est vite fait , sans l'ombre d'un doute islam et humanité évidemment ! comment ose t-on se demander "qu'est-ce que vous proposez" ? Et puis quoi encore !!!


19.Posté par mustapha cherif le 30/05/2010 22:16


Tout musulman ne peut que proclamer le droit au respect des êtres humains et nul ne peut excommunier autrui. Cependant, il est clair que la déclaration de Tareq Oubrou est une contre vérité et un dérapage trés grave sans précedent ! La cause de ce dérapage grave m'est inconnue, en effet pourquoi cet imam d'habitude pondéré profere t-il un propos aussi infondé, anti islam, faux et choquant? Est ce par tactique et ruse pour gagner la sympathie de groupes influents? Est ce un accident incontrolé qui dépasse sa pensée? Cela montre que la situation des musulmans en France est préocupante et mérite concertation et mobilisation contre toutes les formes de préssions, de contre façon, d'instrumentalisations, de diversions et de dérapages. J'en appelle à la vigilance et à la sagesse pour dire stop aux amalgames et stop aux faux débats, alors que les principes sont clairs. L'affirmation fausse d'Oubrou met en danger la santé morale de la communauté musulmane et notamment de sa jeunesse. Il ne faut pas se laisser influencer. Tous les extrémismes sont un danger. L'islam si haut , si noble et si vrai se moque de toutes les délires et perversions.

Fin définitive de mes





[1] Rappelons par ailleurs que le DMS IV, instrument (scientifique et occidental) de critères diagnostiques, a supprimé l’homosexualité de la catégorie des « troubles du genre » seulement récemment et que Freud lui-même y voyait une « perversion ».




[3] A ce propos, on ne peut que sourire, quand certains jeunes militants reprochent à Tareq Oubrou de ne pas être assez engagé auprès de sa communauté confessionnelle, au prétexte qu’il s’applique aussi à parler en dehors de celle-ci. Entre fin 2009 et fin 2010, l’homme de religion bordelais a en effet répondu à des invitations d’émissions radios de qualité (entre autres, deux sur France Culture, une sur RFI, une sur la Première et à la « Pensée et les Hommes » en Belgique), a publié trois tribunes dans Le Monde, et a participé à des rencontres intereligieuses, entre autres, sans compter quelques plateaux télés en France (l’émission confessionnelle du dimanche sur France 2) et en Belgique (émissions confessionnelles également). Ceci faisant suite à la publication de Profession imâm (Albin Michel, 2009). Ceux qui lui reprochent ce parcours extracommunautaire se rendent-ils seulement compte qu’ils débattent et circulent allègrement aujourd’hui dans toute la France voir l’Europe grâce à des associations cultu(r)elles que l’imâm a contribué à fonder ou dont il fut l’un des premiers conseillers à l’époque des vaches maigres (UOIF, FOIE, FEMYSO, AMG, Secours Islamique) ? Une époque où la plupart de ces jeunes gens qui aujourd’hui le critiquent portaient encore des couches, et qui, plus âgés, n’ont jamais fait l’expérience de diriger la prière dans les caves, avec l’humidité et les souris pour compagnons d’infortune. Nous ne saurions que trop leur conseiller la lecture de l’introduction, ainsi que des chapitres I, VII, VIII et IX de Profession imâm et de considérer les 30 années passées dans l’œil du cyclone de sa communauté. Ainsi pourront-ils objectivement confronter leur bilan-engagement au sien.

#2 : Claquer la bise, serrer la main - quand mon paradis dépend de la façon dont je te dis bonjour

Cette pratique, peu connue il y a encore une trentaine d’années au sein des communautés musulmanes, s’est répandue dans les milieux conserva...